Si toi aussi tu as déjà insulté un arbitre (et bien sûr que tu l'as fait), ce texte est pour toi.
Voleur. Vendu. Guignol. Bouffon… Parfois même, enc***. Beaucoup de surnoms affectueux lui sont donnés de l’autre côté de la main courante. Pourtant, affublé de son maillot vert, parfois rose, avec son ton de maître d’école et ses gestes robotiques, c’est grâce à lui que l’on vit notre passion pendant 80 minutes. C’est pourquoi sur le terrain, on le vouvoie et on a coutume de l’appeler « Monsieur l’Arbitre ».
Tu sais, celui qui renonce à ses dimanches en famille, et qui se casse le cul à prendre la voiture les matins d’hiver, direction le terrain municipal. Tout ça pour se faire maudire sur dix générations par tous les vieux du village, les coudes avachis contre la rambarde et la bière à la main. Tu sais, ce justicier en short « La Poste » qui n’a pas le droit à l’erreur, peu importe que ce soit en troisième série ou en Top14. Ce bonhomme atrocement seul, sur un champ de bataille où tous les coups sont permis du moment qu’on ne les voit pas. Ce négociateur un peu masochiste, qui une fois son boulot terminé, file discrètement aux vestiaires avant de renfiler son costume. Ce juge mal payé, qui fait du bon travail seulement quand on n’entend pas parler de lui…
T’es-tu au moins une fois imaginé à sa place ? Un paratonnerre à insultes, écrasé par la pression, « aidé » par des arbitres de touche tout sauf impartiaux, prêtés par chaque équipe et prêts à grignoter le moindre centimètre pour une touche (car oui, on l’a tous fait un jour). Sais-tu comme c’est difficile de rendre la justice, entouré par trente gaillards prêts à s’entretuer, et des centaines d’autres arbitres en tribune ? Tout ça avec pour seule arme… un sifflet. Ah ce sifflet… Il hurle, il compense, il récompense. Il te sert des jaunes, des rouges… et pas dans un verre à ballon. D’ailleurs, tu râles après lui même si tu sais très bien qu’au fond, il a raison. Il te pénalise pour ta tenue en mêlée. Il sanctionne la pizza lancée avec amour par ton talonneur. Il siffle des en-avants sur des passes pourtant unanimement valables depuis la buvette. Il te met à 10 mètres parce que ton 9 a perdu la clé pour fermer sa bouche (clé qu’il n’a d’ailleurs jamais eue). Il t’envoie sous les poteaux la tête basse quand tu prends un essai. Mais combien de fois t’a-t-il fait sauter de joie au moment de siffler trois fois ?
Alors oui, Monsieur l’Arbitre se trompe parfois : après tout, il est humain. Oui, ce sera forcément sa faute si tu perds : après tout, c’est le coupable idéal. Oui il te fait chier, mais il est sur le terrain : après tout, il a la même passion que toi. Tu peux le détester, le maudire, l’insulter lui, sa mère et son chien, mais à la fin du match, tu lui serres la main et tu le remercies. Simplement parce que sans lui, tu ferais quoi le dimanche ?